Chères Cons-goyolaises, chers Cons-goyolais, très chers cons-patriotes, Comme chaque 31 décembre, cette année encore, je suis là pour vous souhaiter tous mes meilleurs vœux. Je sais, vous allez me dire que je vous raconte les mêmes salades depuis que vous m'avez supplié de revenir au pouvoir pour vous libérer du régime tyrannique d'un certain Lissouba. Je sais aussi que vous en bavez à cause de la situation désastreuse héritée de cet ignoble personnage. Mais après dix ans d'efforts constants passés à liquider son héritage, la situation de notre pays est aujourd'hui assainie. Je suis par conséquent en mesure de vous affirmer qu'à compter de l'année 2009, donc à partir de ce soir à minuit, toutes vos galères ne seront plus qu'un mauvais souvenir. Le Congo renait. Oui, chers cons-patriotes. Vous le méritez, votre bonheur. Je sais, chaque année, je vous promets l'eau et l'électricité. Et chaque année, vous n'avez droit qu'à des bidons jaunes et aux coupures de courant. Mais en 2009, donc dans moins de cinq heures, tout ça, c'est fini. Vous ne rêvez pas. Dans moins quatre heures, sortez dans les rues de nos villes, sortez de vos cases, voyez par vous-mêmes combien notre beau pays a changé. Comme c'est merveilleux, ce ciel lumineux. Ces étoiles, ce ne sont pas des étoiles, mais des lampadaires de Socofran. Le barrage d'Imboulou dont je vous parle chaque année, les centrales thermiques de Brazzaville et de Pointe-Noire vont cracher tellement de tonnes de mégawatts que vous ne saurez plus quoi en foutre de votre électricité. Il y en aura tellement qu'il se trouve même que l'Etat va devoir vous payer pour que vous en bouffiez, de ce courant qui vous a tant manqué durant toutes ces années.Chaque année, j’annonce la fin du chômage de masse, grâce à la création des milliers d’emplois pour nos jeunes. Chaque année, je déclare la guerre aux inondations à la tête d’une armée de brouettes, de pelles et de râteaux. Chaque année, je combats sans répit les opérateurs véreux, j'extermine la corruption. Vous connaissez donc ma détermination légendaire à me battre pour l’amélioration de vos conditions de vie et pour notre Etat de droit. En 2009, comme les années précédentes, ces efforts seront poursuivis, mais à la différence du passé, vous n'aurez plus besoin de serrer la ceinture. Grâce à ces efforts, on voit déjà les résultats dans les rues de Brazzaville et de Pointe-Noire où le
péril fécal a été jugulé. C’est vrai, les Cons-golais continuent de mourir de faim, de paludisme, et vos enfants de succomber de diarrhée. Mais plus jamais personne ne meurt de choléra. Et ce grâce à qui, hein ? Grâce à qui, chers cons-patriotes ? Mes très, très chers cons-patriotes, je vous remercie vivement du fond du cœur, et vous suis très reconnaissant d'avoir, depuis toutes ces années que nous faisons route ensemble, su rendre un vibrant hommage à mon action en faveur de votre bien-être. Je n'en tire aucune gloire parce que je suis à votre service. Rappelez-vous qu’à chaque instant de ma vie, de jour comme de nuit, je ne suis que votre humble serviteur. N’écoutez jamais tous ces oiseaux de mauvais augures qui vous vous racontent que je pille les caisses de l’Etat. J'aimerais qu'un jour ces grands esprits qui m'accusent de tant d'actes d'incivilité m'expliquent comment peut-on se piller soi-même. C'est ce que je vais m'attacher à expliquer devant les tribunaux de ce pays néo colonialiste - mais néanmoins ami - où des
traîtres à notre nation, vendus aux intérêts étrangers, me poursuivent inlassablement pour détournement et recel de deniers publics. Nous allons rire, croyez-moi, chers Cons-goyolaises et chers Cons-goyolais.Vous avez déjà vu où est-ce que je vis ? Je possède un modeste deux-pièces à Mpila, souvent inondé et éclairé grâce à un vieux générateur que m’ont fourgué des amis chinois. Et je bois l’eau du puits foré dans la cour. C’est vrai qu’en père prudent, j’ai placé mes économies dans la pierre en France, en Espagne et au Maroc. Les Con-goyolais m'en sont d'ailleurs très reconnaissants, et ils n'ont pas du tout tort. Ils devraient suivre mon exemple, je n'arrête pas de leur rappeler en leur montrant mon ranch et mes plantations. Sans cela, avec la crise que vit le monde de la finance internationale, j'allais me retrouver sur la paille. A ce propos, je suis inquiet pour mes fonds de souveraineté que Total me verse directement sur mes comptes domiciliés dans les paradis fiscaux. J’espère qu’il n’a pas commis l’imprudence d’en confier la gestion à cet escroc de Mardoff, dont on raconte ici ou là qu’il aurait ruiné des milliers de familles riches en Europe et en Amérique du nord. Je me fais du souci pour mes petits flambeurs, Kiki, mes filles et leurs cousins, qui n'ont pas ma prudence. C'est vrai, ils ont encore de quoi vivre pendant des centaines d’années, mais combien de millions ont-ils perdu dans cette folle crise financière avec leurs placements hasardeux ? Dieu seul le sait. En temps normal, quelques cargaisons fantômes au large de nos côtes auraient suffit pour nous refaire une santé, mais le prix du baril n'arrête pas de plonger. Ils sont devenus fous, ces Blancs ou quoi ? Que vais-je devenir, moi, s'ils ne veulent plus de mon pétrole ?Mes très chers cons-patriotes, l'année 2008 qui se termine ne nous a pas fait que du bien. Pas à vous, puisque vous ne possédez rien. Mais à mon clan et à moi-même, les dégâts s'annoncent, je le crains, considérables. Aussi, je vous invite ardemment, chaque vendredi soir, pour nous témoigner votre solidarité, à poser devant l'entrée de vos parcelles une bougie allumée. Si la crise se poursuit, je vous demanderais à chacun d'acquérir obligatoirement mon portrait à un prix modique pour l'afficher dans votre salon, comme pendant mon premier règne. Nous n'en sommes pas encore là. Pour l'instant donc, une simple bougie allumée le vendredi soir suffira. Entre-temps, je vais financer une usine de bougies. Après réflexion, je réalise que ce n'est pas une bonne idée. Les fauteurs de troubles que sont mes prétendus opposants à notre jeune démocratie modèle risquent de retourner ce symbole de solidarité nationale envers la famille présidentielle ruinée, contre mon régime. Oubliez. Mais priez. Priez pour nous. Priez pour que le prix du baril du pétrole remonte au plus vite.Mes très, très, très chers et gros cons-patriotes, malgré cette avalanche de mauvaises nouvelles qui nous viennent de l'étranger, j'ai le plaisir de vous annoncer ce soir que grâce à ma politique visionnaire et aux investissements réalisés durant ces dix années passées, les effets de la crise seront, pour notre pays, moins douloureux que partout ailleurs dans le monde. Les usines ne fermeront pas, il y en a pas. Les banques ne feront pas faillite, il y en a presque pas. Les Cons-goyolais ne perdront pas leurs économies, ils n'en ont jamais eues. Votre pouvoir d'achat ne baissera pas, vous n'en connaissez plus la couleur depuis des lustres. L'accès aux soins ne se dégradera pas, je vous garantie la pérennité de vos mouroirs. Les services publics ne vont pas disparaître, je les ai tous liquidés il y a des années de cela. Vous voyez bien que tout va bien puisque vous êtes tous heureux d'être aussi pauvres. Comme des saints. Vous pouvez me faire totalement confiance et comptez sur moi pour qu'il en soit toujours ainsi, grâce à Dieu.J'ai entendu dire que l'année 2009, c'est aussi l'année d'une élection importante dans notre pays. Mais de quelle élection s'agit-il ? Et élection pour quoi faire ? Vaquez à vos occupations, ne prêtez pas l'oreille à ces oiseaux de malheur qui colportent cette rumeur infondée. Le Congo n'a pas besoin d'élection. Les Cons-golais ou les Congoyolais ne veulent pas de troubles. Ils ont retrouvé la paix et la concorde nationale. Ils m'ont. Ils sont heureux et ont envie de le rester aussi longtemps que je serai envie. A part moi, qui possède les moyens d'entretenir une milice ? Mes chers gros cons-patriotes, chères Cons-goyolaises, chers Cons-goyolais, en faisant appel à moi il y a exactement onze ans, deux mois et deux semaines jour pour jour, vous avez pris la meilleure décision que n'avez jamais prise de votre vie. Continuez sur cette voie de la sagesse qui vous a toujours honoré. Oubliez les élections. Oubliez tous ces trouble-fêtes qui veulent attenter à notre bonheur commun. Priez. Priez pour la paix. Priez pour ma fortune et celle de ma famille. Dieu vous en sera un jour reconnaissant. Vive ma République du Congoyo. Vive ma démocratie autocratique. Ou vive mon autocratie démocratique, je ne sais plus (où j'en suis). Longue vie aux Cons-goyolaises et aux Cons-goyolais. Meilleurs vœux de santé et bonheur pour vous et pour tous vos proches. Bonne année 2009.